La finance digitale en Centrafrique (2) : un trésor qui disparaît

La finance digitale en Centrafrique (2) : un trésor qui disparaît

La finance digitale en Centrafrique (2) : un trésor qui disparaît

En Centrafrique, les revenus des ressources minières tendent à s’évanouir dans l’économie informelle et échappent tant aux autorités qu’aux communautés productrices. Si la situation sécuritaire s’est améliorée, les autorités peinent encore à faire rentrer les devises.

La République centrafricaine est un pays pauvre assis sur un trésor. Mais celui-ci disparaît avant de profiter au pays. La plupart des revenus du secteur minier échappent tant aux communautés qui les génèrent qu’à l’État centrafricain qui les encadre. Une grande partie du trésor centrafricain s’évanouit dans l’économie informelle.Dans le pays, l’exploitation informelle de l’or et du diamant n’a jamais cessé. Ces minerais précieux suscitent les convoitises. En 1973, l’empereur centrafricain Bokassa offre une plaquette de diamant au ministre des finances qui allait devenir Président de la République française. Ils alimentent les rumeurs. Un diamant de cinquante-sept carats estimé à 400 000 dollars US est découvert en 2015. Ils attisent les haines. Les groupes armés terrorisent les communautés locales pour conserver le contrôle de l’économie informelle que ces ressources génèrent.

Dans la période récente, les rivalités et conflits intercommunautaires ont été les principales raisons de la fuite du trésor. En 2013, pour financer leur antagonisme les groupes armés de la Séléka et anti-balaka se sont engagés dans une prédation particulièrement lucrative sur le secteur des minerais.Afin de l’endiguer, lepays fut interdit d’exportation légale de ses diamants bruts par le Processus de Kimberley (PK).

En Centrafrique, cette prédation est endémique, favorisée par la conjonction de plusieurs facteurs dont les effets s’enchaînent. La situation géologique génère une abondance de l’or et du diamant dont l’accès est relativement aisé. Le rapport entre le poids léger et la valeur élevée de l’or et du diamant assure la discrétion des transactions. Leur exploitation génère une économie informelle dont les groupes armés contrôlent les procédures. Les autorités peinent à identifier et gérer les flux illicites, laissant ainsi échapper des revenus publics potentiels.

Quand la situation sécuritaire du pays s’améliora au début 2015, l’accalmie permit à la RCA de connaître une croissance de sa production de minerais. Ainsi, la recrudescence de l’activité aurifère eut pour effet d’augmenter la production. Les exportations formelles d’or progressèrent significativement. Pourtant, malgré ces résultats encourageants, la majorité de la production nationale annuelle reste encore illégale représentant environ 95 % du marché. Pour l’État le manque à gagner reste considérable. En 2018, le secteur minier représentait 0,2 % du PIB, bien loin des 7% de 2007. Les autorités peinent donc à faire rentrer les devises en raison de l’informalité du marché de l’or et du diamant. La rue de Bangui bruisse de ces rumeurs d’échange de valises de dollars contre des lingots de minerai fondu ou des lots de diamants bruts qui sortent discrètement du territoire. Par la route ou en avion, l’or et les pierres précieuses quittent le pays par des frontières perméables.

Les autorités centrafricaines ne restent pas inactives. Pour lutter contre le détournement de l’or et des pierres précieuses, le gouvernement a pris des mesures notables visant à rapprocher le secteur minier de l’économie formelle. Par exemple, la délivrance de permis participe de campagnes successives d’enregistrement des exploitants pour rendre les licences d’exploitation artisanale plus accessibles.

Cette politique est essentielle dans la mesure où l’exploitation minière est la condition du maintien de la condition économique de nombreux habitants du pays. Plus de 90% des activités minières sont de type artisanal traditionnel, parce que les gisements sont peu adaptés à une exploitation mécanisée et qu’en raison de la crise, les investissements étrangers sont rares. Surtout grâce à son secteur informel, l’exploitation minière constitue la source principale de subsistance, souvent de survie, d’une importante proportion de la population centrafricaine : 35 000 artisans exploitants, 270 000 ouvriers mineurs, annuellement 30 milliards de francs CFA par an dans les zones rurales, 45 milliards de francs CFA pour l’économie secondaire, des revenus indirects pour plus de la moitié de la population. Pour contribuer à la formalisation du marché des minerais précieux, la finance digitale offre des opportunités...

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